| Le 21 juin 2010
C'est aujourd'hui la fête de la musique en France et dans 110 pays
dans le monde entier. À cette occasion, je vous fais part de
quelques réflexions du moment sur la relation entre la danse et la
musique (ou inversement). En effet, en danse libre en couple, le principe
communément appliqué lors des soirées dansantes est que l'orchestre
ou le DJ propose les morceaux de musique sur lesquels la danseurs
improvisent leur danse. Cela n'est cependant pas le cas dans toutes
les situations.
Je regardais récemment l'émission "Got to dance" qui passe sur Gulli
et j'ai été frappé par le fait que toutes les chorégraphies de hip-hop
étaient dansées sur un morceau de musique fait sur mesure. À la
limite, je dirais qu'il était difficile de qualifier cela de musique
tellement il y avait de bruitages et de petits bouts de 10 secondes
enchaînés les uns derrière les autres. Il est certain que le spectacle
était là, la bande-son mettait en valeur les mouvements des danseurs
et les positions en arrêt qui étaient prises. Mais au niveau de mes
oreilles un peu mélomanes, c'était peu agréable. Et pourtant, j'apprécie
tous les morceaux de r'n'b, dancehall ou electrodance qu'on entend
sur les ondes aujourd'hui. Je me suis dit que la bande-son n'était pas
un assemblage de titres aux ambiances différentes avec quelques transitions,
mais plutôt un assemblage de transitions avec quelques notes d'ambiance.
Je considère que la musique et la danse sont indissociables. Si l'on
a une belle musique associée à une belle danse, c'est déjà bien. Mais
si, en plus, les deux concordent parfaitement, c'est l'idéal. Certains
enseignants en danse qui auront préparé des chorégraphies pour finir
la saison par un gala se seront probablement posé la question de
cette concordance. D'autres non, et c'est dommage. Je crois qu'au
minimum la danse doit pouvoir s'adapter à une musique donnée. C'est
comme cela que sont créées les chorégraphies : le chorégraphe écoute
la musique et exprime ce qu'il ressent dans sa création chorégraphique.
Cela semble évident en danse classique par exemple. Rappelons aussi
qu'un morceau de musique est bien souvent enregistré ou mis en partition
et qu'il est donc difficile aux musiciens de la modifier et de
s'adapter à la danse sans en changer la nature.
D'un autre côté, il y a un genre musical que j'apprécie tout particulièrement
et qui fait exception : le swing. Comme toute forme de jazz, le swing est
basé sur l'improvisation. À l'époque des big bands dans les années 1930
et 1940, les morceaux de swing étaient composés pour faire danser les
foules et, lors de leur interprétation en public, il arrivait fréquemment
que les musiciens réagissent à la manière de danser du public et modifient
ainsi leur improvisation. Ce jeu entre les danseurs et les musiciens
(qui n'hésitaient pas à se faire mutuellement des blagues et clins d'oeil)
est très bien décrit par Frankie Manning dans son autobiographie.
Comme je l'ai laissé entendre plus haut, de nos jours, la technologie
numérique permet de constituer un morceau à partir samples et de bruits
ou de restructurer un morceau de manière qu'il colle à un enchaînement
chorégraphique donné. C'est donc la musique qui s'adapte à la danse.
L'idéal est, bien évidemment, quand la musique va vers la danse
et vice-versa. Les deux genres se complètent et se rencontrent au juste
milieu pour le meilleur effet général possible. L'impression que cela
doit donner est que la musique est faite pour la danse
et que la chorégraphie dansée est faite pour la musique jouée.
Pour y parvenir, les qualités de danseur ne suffisent pas, il faut aussi
des qualités dans le domaine de la musique. Tout se passe très bien
quand le danseur est musicien et quand le musicien est danseur, mais
ce n'est pas toujours le cas.
Je terminerai ce billet par une pensée pour Myriam Passavant dont
le partenaire à la vie comme à la scène, Gilles, vient de décéder.
Myriam et Gilles (leaders de la troupe des Fous du Swing à Nanterre) sont ceux à qui je dois d'avoir commencé le lindy hop
il y a plus de dix ans et j'ai fait mes premiers pas dans cette danse
dans l'un de leurs cours. J'ai évidemment franchi de nombreuses étapes
depuis, mais nous nous croisions régulièrement (la dernière fois était
au festival swing de Paris en novembre dernier). Ils sont donc aussi
pour quelque chose dans l'existence du livre de technique de
lindy hop que je viens de terminer. Une page se tourne, Gilles nous manquera,
mais la danse continue. Je rend donc hommage ici à la contribution de celui-ci
au développement du lindy hop en France et à ce qu'il m'a apporté personnellement
grâce à sa disponibilité et ses compétences de danseur et enseignant.
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